[dropcap]Il[/dropcap] fallait s’approcher à quelques centimètres pour l’entendre.
Alors il emplissait et effaçait le silence de la nuit.
Même sa fraîcheur.
Difficile à décrire en quelques mots un bruit pareil empli de tant de sonorités.
Il faudrait des pages, un récit complet, des volumes, une encyclopédie.
Un bruit d’orchestre symphonique et de foule autour d’un kiosque, de défilé militaire au bord d’une esplanade et de course automobile dans les rues de la même ville, de carnaval avec danseurs et chars, surplombé de gradins bondés de gens debout hurlant, chantant, de « banda » jouant sur le quai et de train freinant et arrivant sous les voûtes immenses d’un gare, d’envol subit, bruit d’ailes comme des applaudissements dans le silence d’une multitude d’oiseaux planant bientôt au-dessus d’un lac rose d’algues et de sel en décantation, cris répétés, jetés, trouant l’air, enfoncés comme des flèches, d’une chanteuse de bel canto vocalisant inlassablement des arpèges devant sa fenêtre ouverte, tentatives perçantes, grinçantes, d’un enfant apprenant à déchiffrer une partition au violon seul dans son salon, cacophonie de dispute à plusieurs voix finissant en harmonie d’opéra.
Sorte de film complet dont la bande son assez puissante effacerait l’image virée au noir, calcinée, puis miraculeusement susciterait en retour toutes les images dessinées dans le moindre détail.
Car ce bruit assourdissant finissait par faire naître en fenêtres successives, une série d’images, un défilé de cases de bandes dessinées alignées en bandes, bourrées de personnages et de détails, brins d’herbes, feuilles, poil sur le nez, rougeur des joues, ongle rongé, noisette, s’échappant en rubans dans la nuit.
J’étais saisi d’effroi. Il y avait là quelque chose de trop concentré, compact, surchargé, inconséquent.
Au cœur de la nuit étant debout, éveillé devant un coffre invisible occupant un parallélépipède à corniche d’un mètre de haut ou presque reposant sur un socle le mettant légèrement au-dessus du sol herbeux et humide des évaporations nocturnes et lui permettant un appui avec un très léger enfoncement dans ce sol inculte et ingrat que je croyais connaître.
Amoureux de la Catalogne, david domitien duquerroigt y vit maintenant un peu retiré du monde. S’il a côtoyé une partie de sa vie, avant la chute du mur de Berlin, les attachés culturels us ou soviets, sans avoir autant qu’eux l’air d’un espion, c’est que à côté de ses contes utopiques, caché derrière les ronds de jambes de ses représentations diplomatiques, il s’est donné pour tâche d’écrire secrètement l’histoire compliquée de Dio Darko Brac, l’agent de la délégation de la défense extérieure, détaché auprès de la section ne figurant sur aucun organigramme de la direction des affaires étrangères non élucidées.
La nouvelle histoire que ddd met en route après son blog ayant pour siège la gare de Perpignan sur le Nouvel Obs et son essai de raconter sa vie ou son ultramort sous la Maison Carrée de Nîmes, est celle, amicale et nostalgique de la rencontre avec le fils de Dio, un jeune homme tranquille.
Mais voici tout à coup que ddd se retrouve à nouveau, aux approches de la maison Carrée, dans son archi-dessous envahi par les eaux après être passé par le fond de son jardin . . . pour une nouvelle aventure bionico-sf.